[Vidéo] Gestion des ASC : retour sur les règles, aperçu des nouvelles pratiques

[Vidéo] Gestion des ASC : retour sur les règles, aperçu des nouvelles pratiques

13.11.2019

Représentants du personnel

Le passage au CSE change-t-il la façon dont les élus du personnel gèrent les activités sociales et culturelles proposées aux salariés ? Nous avons posé cette question aux représentants du personnel, experts et prestataires présents la semaine dernière lors du congrès CFTC. Voici leurs témoignages et leurs analyses.

 

 

A priori, les ordonnances n’ont pas apporté de bouleversement dans les règles que les élus du personnel sont tenus de suivre pour la gestion des activités sociales et culturelles (ASC) servies aux salariés (lire ci-dessous notre encadré). Mais la fusion de toutes les instances représentatives en une seule, le comité social et économique (CSE), change néanmoins la donne.

Les élus des CSE, qui comptent beaucoup de nouveaux venus n’ayant pas d’expérience en matière d’activités sociales et culturelles, s’avèrent moins disponibles. « Pas facile de les contacter pour leur proposer des activités », témoigne ce prestataire d’un grand opérateur. En plus des sujets économiques et des ASC, ils doivent, de fait, prendre en charge des aspects autrefois dévolus aux DP et CHSCT : les réclamations individuelles et collectives (lire notre article à ce sujet) et toute la thématique des conditions de travail. 

Un changement de vision de la part des jeunes générations d'élus

 

« Il y a aussi un changement de vision sur les ASC de la part des nouvelles générations. Il y a une recherche de simplicité et d’efficacité, une sorte de collectif individualiste », analyse ce prestataire expérimenté. Adieu permanences du CE et billetterie délivrée en main propre, qui représentaient autant d’occasions d’échanges avec les salariés pour les élus du personnel ? Pour ce professionnel, qui d’ailleurs le regrette, il est inévitable que, pris par le temps et les multiples charges à assumer, les CSE optent de plus en plus pour des logiciels de gestion et d’offres d’activités, un diagnostic qui corrobore certaines analyses soulignant "un tournant dans la gestion des activités sociales et culturelles".

Le changement de périmètre rabat toutes les cartes

Le changement de périmètre opéré à l’occasion des élections professionnelles rabat aussi les cartes en matière de loisirs culturels. On peut, comme Jean-Paul Yonnet, président du cabinet d’expertise Orseu Explicite, y voir des avantages : « Le regroupement dans un établissement plus important peut permettre aux élus de négocier des tarifs plus avantageux. Vous n’avez pas le même pouvoir de négociation quand vous représentez 150 salariés que lorsque vous en représentez 1 500 ». Dans ces CSE importants, ajoute l’expert, le secrétaire du CSE devra « manager » son équipe d’élus, chacun étant spécialisé sur un domaine (ASC, santé au travail, etc.), tel élu président par exemple la commission activités sociales et culturelles. Une coordination qui s’apparente à celle que peut conduire un maire mais qui comporte aussi un risque de bureaucratisation des IRP du fait de la centralisation et de l’éloignement des instances avec une large partie des salariés.

Avant, dans notre CE, les gens se connaissaient, ils participaient aux activités proposées par le comité

 

On peut également considérer que ces évolutions ne sont pas toujours heureuses. Comme trésorier d’un CE de Seine-et-Marne pendant 14 ans, Jean-Bernard Loche-Brunet a vécu la convivialité créée autour des ASC dans un établissement de 230 personnes, le comité disposant d’un budget annuel d’environ 160 000€ pour ces activités : « Les gens se connaissaient tous. Ils s’appelaient pour demander : tu vas au truc proposé par le CE ? Il y avait une bonne ambiance et lorsqu’il manquait une place pour un voyage qu’on organisait, on trouvait toujours une solution ». 

Depuis les élections professionnelles, le CSE Banques Populaires ayant absorbé l’établissement de Seine-et-Marne ainsi qu’une partie de Paris et la Normandie, compte 2 800 salariés. « Je ne suis plus élu, mais ma femme oui, raconte ce militant CFTC désormais actif au niveau de la branche. C’est beaucoup moins évident de pouvoir organiser des sorties, de penser des activités avec des salariés situés à des endroits très différents et qui ne se connaissent pas. On a perdu le côté convivial qu’on avait». Autre crainte, rapportée par plusieurs élus : se retrouver, du fait de la phase de transition entre CE et CSE et du changement de périmètre, avec des salariés ne bénéficiant plus pendant un temps de la moindre ASC, ce qui pourrait alimenter une forme de grogne à l’égard des IRP.

Et du côté des reliquats ?

La nouvelle possibilité offerte, à l’occasion du passage du CE au CSE, de faire basculer des reliquats du budget fonctionnement vers le budget des ASC, une possibilité également offerte dans la limite de 10% d'un reliquat chaque année, est-elle saisie par les élus ? « Nous avons choisi de basculer une partie de nos réserves vers le budget ASC, car nous avons d’abord pensé aux salariés », dit cette élue du CSE unique d’une société d’assurance de 9 000 salariés qui dispose d’importants reliquats sur son budget de fonctionnement.  Mais d’autres élus d’entreprises plus modestes se montrent prudents (voir ci-dessus nos témoignages en vidéo). Comme si le passage en CSE représentait un saut dans l’inconnu et qu’il fallait ménager ses arrières en ne grillant pas toutes ses cartouches, fût-ce au nom du pouvoir d’achat…

 

Gestion des ASC : les dispositions essentielles

Les ordonnances créant le CSE n’ont bouleversé ni la définition des activités sociales et culturelles (ASC), ni leurs modalités de leur gestion par les élus. Rappelons que, depuis 1945, le CE, et maintenant le CSE, dispose, en toute indépendance, du monopole de la gestion de ces activités sociales et culturelles, les oeuvres sociales ayant longtemps été dispensées par des employeurs paternalistes.

Quelle est la définition des activités sociales et culturelles ?

Selon l'article R.2312-35 du code du travail, les ASC comprennent :

  1. des institutions sociales de prévoyance et d'entraide;
  2. des activités sociales et culturelles tendant à l'amélioration des conditions de bien-être, telles que les cantines, les coopératives de consommation, les logements, les jardins familiaux, les crèches, les colonies de vacances ;
  3. les activités sociales et culturelles ayant pour objet l'utilisation des loisirs et l'organisation sportive ;
  4. les institutions d'ordre professionnel ou éducatif attachées à l'entreprise ou dépendant d'elle, telles que les centres d'apprentissage et de formation professionnelle, les bibliothèques, les cercles d'études, les cours de culture générale ;
  5. Les services sociaux chargés :   a) De veiller au bien-être du salarié dans l'entreprise, de faciliter son adaptation à son travail et de collaborer avec le service de santé au travail de l'entreprise ;  b) De coordonner et de promouvoir les réalisations sociales décidées par le comité social et économique et par l'employeur ;
  6. Le service de santé au travail institué dans l'entreprise.
Quelles sont les règles de gestion à respecter ?

Ce sont toujours les tolérances et les plafonds fixés par les Urssaf, en attendant une éventuelle législation sur le sujet (lire notre article), qui permettent aux comités de ne pas acquitter de cotisations sociales sur ces avantages apportés aux salariés.

Quelles sont les nouveautés apportées par les ordonnances ?

Quelques changements cependant doivent être soulignés. En l’absence d’accord sur le sujet entre l'employeur et les syndicats ou les élus, c’est désormais la contribution de  (exprimée en pourcentage de la masse salariale) apportée aux ASC par l’entreprise l’année précédente, et non plus les trois dernières années auparavant, qui sert de référence au calcul de la dotation du budget des activités sociales et culturelles. Dit autrement, un employeur ne peut pas baisser d'une année sur l'autre le pourcentage de masse salariale servant à financer le budget ASC (art. L. 2312-81 du code du travail), ce qui n'exclut donc pas des baisses en cas de réduction de la masse salariale. Contrairement au budget de fonctionnement (0,2% de la masse salariale jusqu’à 2 000 salariés et 0,22% au-delà), la loi ne donne toujours pas de niveau minimum ou maximum pour cette dotation.

Par ailleurs, lors du passage du CE au CSE, les élus ont la possibilité d’affecter une partie des réserves d’un budget sur l’autre (du fonctionnement vers les ASC ou inversement). Enfin, chaque année, le CSE peut, s’il le souhaite, affecter 10% de son reliquat du budget de fonctionnement vers le budget des activités sociales et culturelles (art. R.2312-51), ce choix devant apparaître dans le bilan annuel de gestion du comité.  

Ces transferts de reliquats peuvent-ils avoir des conséquences ?

Concernant les expertises du CSE, oui ! Le code du travail oblige en effet le CSE à cofinancer avec l'employeur certaines expertises. Pour ces expertises, ce n'est que lorsque le CSE se retrouve sans assez d'argent disponible pour financer sa quote-part, que l'employeur est alors tenu d'en payer 100%. Mais attention, pour pouvoir bénéficier de ce parachute, le CSE ne doit pas avoir opéré de transfert d'excédent du budget de fonctionnement vers celui des ASC au cours des trois années précédentes. Et lorsque l'employeur prend en charge la quote-part du CSE, le comité ne pourra pas décider de transférer des excédents de son budget de fonctionnement vers celui des ASC durant les 3 années suivantes (voir la dernière phrase de l'art. L. 2315-61).

Le comité doit-il établir un bilan annuel de sa gestion ?

Les élus sont tenus de présenter, lors de leur rapport de gestion annuel, un bilan des ASC (art. L. 2315-69). Nous avons évoqué plusieurs exemples de ces bilans dans nos articles (voir par exemple ici).

En outre, une loi de 2014 impose la création d'une commission des marchés afin que les critères de choix des fournisseurs soient transparents. Cette dernière obligation ne vaut que pour les CSE remplissant deux des trois critères suivants (des produits supérieures à 3,1 millions d'€ par an, un total de bilan supérieur à 1,55 million, 50 salariés appointés par le comité) et qui attribuent des marchés supérieurs à 30 000€ (voir l'article L. 2315-44-1 et suivants).

► Ces lignes ont été écrites avec l'aide de Frédéric Aouate, rédacteur en chef du guide CSE des Editions Législatives.

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Bernard Domergue
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